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Désir et responsabilité de l’analyste

Désir et responsabilité de l’analyste
face à la clinique actuelle
érès
31/03/2013

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Je n’aime habituellement pas faire une recension d’ouvrage d’un collectif d’auteurs mais je vais faire une exception pour celui-ci dont la qualité et l’homogénéité toute lacanienne en font un outil de repérage pour les praticiens actuels de la psychanalyse.

Qu’en est-il aujourd’hui de leur pratique, de leur engagement, de leur responsabilité dans les nouvelles normes de notre société où les pathologies évoluent en miroir ? Magnifique question, et richesse avérée des réponses des auteurs qui, du fait de leur expérience clinique, ont réfléchi  à cette problématique. Société en mutation, analystes en mutation ? A voir !

En cinquante ans, on a assisté à l’assomption de la télé et d’internet, à la multiplication des sources d’addictions, au culte de l’objet ; sur un autre plan, à l’instauration du mariage gay, aux possibilités des FIV, à la liberté due à la contraception, à l’avortement, au règne de la maîtrise des corps par le sport ou la chirurgie esthétique, à l’essor du tout médicament et des thérapies cognitivistes ; et enfin, à la perte des idéaux, amoureux, religieux ou politiques. Une révolution qui n’est pas sans conséquences. L’absence de répression moralisatrice supprime les frustrations, et les inhibitions, voire même, la culpabilité. La névrose peine à s’y retrouver. Elle laisse de la place à la psychose ordinaire (ou pas) qui flambe dans la valse des objets@. Le lien social disparaît et les demandes avec. Perte de la tradition, de la dette, de la culture. C’est une observation politique. S’ouvre le règne de la connexion illimitée avec les inconnus et de la distance égocentrée avec les proches, dans un bain de confusion des générations..

L’émancipation des femmes a créé un déclin social de « l’imago paternelle ». En a découlé un dérapage vers une dynamique d’égalisation des sexes, devenue, par une forme de discrimination sociale, enjeu idéologique plutôt que structuration psychique. Ce processus se décline jusque dans un consumérisme sexuel sans limite où le sujet se noie. On assiste donc à des comportements récurrents de mises en acte, visant à faire abstraction d’une parole qui reflèterait une économie subjective équilibrée. Mis à mal dans ces nouvelles configurations, les sujets apparaissent comme ayant perdu la notion de la dimension métaphorique, de l’accès au Symbolique et du décryptage, reconnu comme éclairant, du symptôme. Les propos deviennent impersonnels, imprégnés du discours courant normatif, bien loin des capacités de trouvailles d’un sujet qui s’assume. Sur le versant clinique, s’installe alors un autre rapport à l’autorité, et par conséquent, à la demande envers l’Autre, en l’occurrence le thérapeute ; celui-ci se voit décrédibilisé de son statut « de sujet supposé savoir » et se retrouve même contesté dans son savoir propre, ce qui, d’emblée, ébranle le transfert à l’implication duquel, il va falloir s’atteler.

La surconsommation et l’effervescence des loisirs, le tout, tout de suite, et en quantité, voire pléthore, ont généré un manque du manque ; tout est possible, tout est dû, et dans l’immédiateté. Plus de désir mais des envies, plus de subjectivation, mais du bouchonnage par des objets. S’instaure, ainsi, une pratique coutumière de victimisation des sujets qui y perdent toute notion de responsabilité de leurs actes et de leurs dires. Pris dans une spirale, où le choix n’est plus orienté mais manipulé, ils ne cherchent plus à entendre le signal mouvementé de l’inconscient dans leurs symptômes, mais visent continuellement une négociation avec eux-mêmes qui féconde le terreau de l’essor comportementaliste. La quête de la jouissance fait prévaloir celle-ci sur le désir, et épargne toute confrontation au manque, pourtant apte à fonder un sujet structuré. Résultat sur la relation thérapeutique : une exigence de réponse magique, immédiate, signant le peu de capacité du sujet à s’impliquer dans un profond remaniement subjectif. Là aussi, le temps est à faire prendre en compte comme régulateur d’une fondation solide.

Quand on a dit cela on n’a cependant pas tout dit. Chaque changement de société implique une forme d’adaptation et en son sein, chacun reste libre de faire ses choix, d’y trouver sa place et de cheminer dans sa vie. De ce fait, la rencontre avec un psychanalyste reste toujours une bonne occurrence même si les modalités de la demande se sont un peu transformées. En cela, rien n’empêche la maintenance de l’engagement du praticien mettant en jeu son désir d’analyste et se faisant un lieu d’adresse privilégiant le singulier d’un sujet. L’exigence est la même, simplement compliquée par le temps de latence des entretiens préliminaires qui s’allongent pour faire admettre et privilégier une acceptation de l’inconscient comme lieu, par les névrosés du XXI° siècle. Il s’en déduit que l’éthique n’a ni âge, ni effet de mode. Et que le psychanalyste a encore un bel avenir devant lui pour autant qu’il se présente comme manquant, mais fiable d’une parole structurée. Une parole qui prenne en compte l’accueil de la structure avec ce qu’elle apporte de singularité inventive et non pas, comme le prône la nomination actuelle des DSM, une caractérisation des sujets par, avec, et en fonction de leurs symptômes, c’est à dire du côté d’une logique déficitaire, d’une carence lestée du signe d’un moins, synonyme de ségrégation. Et cela n’a rien de très nouveau si l’on en croit Freud qui écrivait déjà en 1916 : « Réduire la pensée scientifique à un chiffrage relève d’un obscurantisme assez navrant » (S. Freud Introduction à la psychanalyse, Paris, Petite bibliothèque Payot, 1981, p 242)

Florence Plon


 

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