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la fonction paternelle dans le travail social

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Ignacio Gatate-Martinez

vendredi 26 mars 2004

Ce texte, revu par l’auteur, est le résultat de la transcription d’une conférence 2 orale, construite à partir de notes. Le passage à l’écrit impose un toilettage fut-il minime, ainsi que l’appareil critique indispensable au travail de lecture. Le caractère “ parlé ” de ce texte a été maintenu pour en préserver la saveur et la convivialité.

A) Introduction

Évidemment, cela ne facilite pas les choses de dire à quelqu'un que ce qu'il va faire est difficile ; moi je venais là en pensant que ça allait être extrêmement facile, et tout à coup, je me sens entre deux eaux, en me disant : “ et bien voilà que venir à PAU est beaucoup plus facile qu'arriver au théâtre Saint-Louis. ” Premièrement, plus rapide, je suis venu par St-Geours de Marenne, Peyrhorade, Pau, et puis, déjà à Pau, pour arriver dans ce théâtre, il fallait traverser les embouteillages ; je vous conseille ce chemin, il est meilleur que l'autre, paraît-il…

Pourquoi est-ce que je dis cela ? Parce qu'il me semble que ce qui peut être compliqué pour chacun de nous, non pas chacun de ceux qui sont présents ici, au théâtre Saint-Louis, ou dans le travail social ou dans la pratique de chacun, ce qui est extrêmement compliqué pour chaque être parlant, c'est de quitter le lieu où nous sommes considérés comme expert pour tenter de nous placer en tant que femmes ou en tant qu'hommes qui parlent, qui prennent la parole . C'est vrai qu'à ce moment-là, chacun de nous peut avoir besoin de bandage herniaire pour se contenir.

Je crois aussi qu'il est extrêmement compliqué pour chacun de nous, quel que soit notre lieu d'expertise —et d'autant plus s'il n'y a pas de lieu d'expertise pour nous comme dans le cas des travailleurs sociaux —, de se situer en tant que femme ou en tant qu'homme dans le silence du désir. S'il se tait, ce n'est pas parce qu'il n'aura rien à dire, Dieu sait à quel point nous avons des choses à dire : si nous disions toutes celles qui sont restées en souffrance, nous pourrions remplir des romans, des fleuves, des romans-fleuves ; il se tait, au contraire pour inscrire sa position dans le sillage de celle du Dieu Créateur, dans la Kabbale : faire tsimtsoum 3 , c'est-à-dire se rétracter pour que la parole de l'autre puisse avoir une place, faire silence pour accueillir la parole de l'autre, se taire à l'endroit précis où le silence aurait un effet créateur, créateur d'une parole qui serait, en ce sens, autre , radicalement autre , différente , capable de subvertir même nos convictions, nos certitudes : une parole dans sa splendeur, une parole femme .

Comme le dire ne suffit pas, il n'est pas sûr qu'on le fasse. Nous autres, chacun de nous, chacun-de-nous-femme , a beau se dire parole de femme , ce n'est pas sûr qu'elle se produise, cette parole-là. Il se pourrait que l'on soit gênés par notre virilité, gênés aux entournures, ou qu'on soit gênés par notre féminité aux autres entournures, tout contre d'ailleurs, puisque ces entournures nous contournent chacun de nous, et font contour l'une de l'autre , puisque nous nous touchons, tangentiellement 4 , là où se trouve notre différence ; autrement on ne se toucherait pas, nous ferions comme les aimants , nous nous répulserions —Cela arrive aussi, parfois… Cela arrive que notre contact fasse répulsion ; ça vous est arrivé..... ? Enfin, si vous me disiez “ non ”, je ne vous croirais pas, ne dites donc rien, poursuivons....

Alors, comment voulez-vous faire pour parler ? Et pour parler de quoi en fait ? C'est un colloque sur quoi ? “ L'évolution de la fonction paternelle ”… Vous ricanez, alors moi, ça me gêne : à chaque fois que je vais quelque part et que j'essaie de parler sérieusement, tout le monde se met à rire.... Cela finit par me complexer et puis cela fait tout de même plusieurs mois que je travaille sur ce truc-là … Si à chaque fois vous vous dévissez l'esprit à force de rire , vous allez finir par me visser moi-même dans une sorte de geste ampoulé ou rigolo, ce qui revient au même.

C'est vrai, tout de même, qu'un colloque qui s'appelle “ l'évolution de la fonction paternelle ” supposerait que la fonction paternelle évolua ! ...Voilà l'évolution de la fonction paternelle ; mais comment une fonction peut-elle déambuler ? Comment peut-elle le faire ? Moi, fonction-- paternelle , je déambule.... Où ? Où déambule-t-elle ?

Elle a peut-être un statut ambulatoire , c'est-à-dire qu'elle est un peu malade. Mais vous voyez, le problème, et bien le problème c'est précisément que la fonction paternelle ne se meut pas ; elle se produit ou elle ne se produit pas, à un moment donné, dans un contexte donné, dans une histoire, mais aussi dans un roman, il y a quelque chose qui fait fonction paternelle ou qui ne le fait pas. Ça n'a rien à voir, évidemment, avec ce que vous appeliez tout à l'heure, j'imagine, parce que je n'étais pas là, la patria potestas 5 , j'imagine que ce matin il y a quelqu'un qui vous a raconté cette histoire, non ? Autrement il faudrait que quelqu'un le fasse.

Laissons, ce matin, c'était le matin du monde… Ceci pour parler de l'origine qui n'est pas le commencement , comme l'acte n'est pas l'action , vous le savez bien, non 6 ? Il y a des gens ici de l'A.S.E. ? Est-ce que l'A.S.E. existe ? Y a-t-il des gens de l'A.S.E. ici ?

Et, au fait, qu'est-ce que ça veut dire l'A.S.E. ? Qu'est-ce que cela veut dire ? “ L'Aide Sociale à l'Enfance ”, me dites-vous. Ah bon, ben voyez, ça tombe mal, ça aurait pu vouloir dire “ l'Action Sociale à l'Enfance ”. Non, attendez, je me trompe… Et l'A.E.M.O., qu'est-ce que ça veut dire ? Ah, vous voyez bien qu'il y a des actions, hein ? Assistance , dites-vous ? Oh non... Non, s'il vous plaît, autrement je n'aurai aucun exemple à vous donner !... En tout cas, on ne dit pas Acte Educatif en Milieu Ouvert... Vous êtes donc d'accord avec moi.

B) Commencement et origine, action et acte

L'action n'est pas l'acte, est-ce qu'il y a des gens ici qui ont eu des enfants... ? Vous, par exemple, vous avez des enfants... ? Vous en avez eu. Eh bien Madame, et quand est-ce que vous leur parlez du moment où ça commence ? Ça commence quand leur être enfant ? Dites-le moi !... Vous ne leur dites pas ?

Maryse VAILLANT : “ Eh bien, j'aurais jamais dit ça !... ”

Ignacio GÁRATE-MARTÍNEZ : “ Comment vous ne leur avez jamais dit… Alors ça va mal, quel âge ont-ils ? ”

Maryse VAILLANT : “ Oh, ils sont grands !… ”

Ignacio GÁRATE-MARTÍNEZ : “ Alors, c'est pour ça.... Ils ne vous l'ont pas encore demandé. ”

Mais tout de même quand, dans la table familiale, alors qu'on est en train de manger, s'il y a de quoi manger, parfois quelqu'un dit : “ maman —ou papa—, raconte-moi ma naissance ”, ou pour le dire autrement, “ Comment c'était quand je suis né ? ” Ils ne vous demandent pas ça ? Ah bon… Eh bien, s'ils vous le demandaient, la question que vous vous poseriez, à chaque fois, serait celle de savoir s'ils veulent que vous leur racontiez leur commencement ou leur origine .

N'est-ce pas vrai ? Quand on dit, dans cette merveilleuse langue que certains parmi vous connaissent, lorsqu'on dit en espagnol “ donner à la lumière 7 ” pour désigner l'accouchement, lorsque, pour dire la naissance, l’on prononce : “ donner à la lumière ”, c'est que le commencement vient après quelque chose d'obscur , d'avant la lettre, et qui se nomme l'origine, le mystère de l'origine.

Vous vous rendez bien compte, n'est-ce pas, que l'origine n'est pas le commencement.

Avant même de naître, avant même de n'être quoi que ce soit, avant même de se poser la question de savoir “ comment c'était quand je suis né ”, demeure, dans l'obscur, la question de l'origine, cette shekina , cette présence —dont parle le Zohar 8 — et qui rétracte sa lumière pour donner place à l'incarnation d'un sujet.

Un humoriste espagnol remarquable, “ Gila ”, disait : “ quand je suis né, ma mère n'était pas là , alors j'avais faim et je suis descendu voir la concierge pour lui demander de me donner à goûter. Quand elle est revenue, ma mère s'est fâchée et m'a dit : “ On ne demande pas à manger aux inconnus ” surtout s'ils habitent dans le même immeuble que toi… ”

Ah, je vous fais rire encore, je vous signale que j'ai préparé un travail sérieux sur la fonction paternelle dans le travail social , et vous êtes en train de me faire rire et je vais finir par me déconcentrer. Je vous prie de moins rire, s'il vous plaît, de rester sérieux et attentifs et de prendre des notes comme il sied !

On ne peut pas à chaque fois établir un questionnement à partir d'une discipline académique. D’ailleurs, ceux qui se nomment “ travailleur social ” savent très bien que, quelle que soit la discipline ou le niveau d'expertise, leur connaissance n’a de sens que dans les réunions de synthèse : le savoir sur l'autre, posé dès lors comme agression assujettissante, comme bouchon de l'avènement de sa parole, ne sert qu'à se partager —dans une grimace pseudo eucharistique— le corps de notre objet, totem que psychologues, psychiatres, psychanalystes, psy-quelque-chose, mais aussi les autres, le déchet , la roture , l'éducateur , l'assistante sociale , tout ça, le fatras … Ils partagent en communion cannibale.

Par contre, la question sur l'acte se pose au moment où je m'immisce dans la misère d'un autre, un autre qui ne m'a rien demandé, sauf si l'exubérance de sa misère était une demande, un autre qui m'éclabousse parce que sa misère me rappelle ma propre ambiguïté. C'est à ce moment-là, qu'il est bien question d'un homme qui parle, d'une femme qui parle, au risque de ce qu'il y a de plus intime en lui-même, au risque de ne pas rester hors de jeu , c'est-à-dire au risque de sa propre entame .

Cela ne veut pas dire que le contexte culturel ou ce qu'on appelle le roman familial puisse ne pas faire débat dans les colloques —on y va bien pour se colloquer hein ? — sur le contexte transculturel , sur la psychanalyse , sur..... tout ça ? Eh bien, voyez-vous, je suis totalement d'accord avec ma très charmante camarade de tribune, à savoir que la question fondamentale que l'on se pose à un moment donné à propos de l'immigration, c'est ce qu'on disait… Comment disait-on déjà en Arabe : Awlad ch'koun ? Je crois que ça se dit comme ça, c'est-à-dire.... Il y a des gens qui parlent l'Arabe ici ? Hein ? Ça se dit comme ça, Madame ? Merci. C'est-à-dire, donc, Les enfants de qui ? 9 Fils d'un père humilié qui ne demandait pas à l'être.... qui s'est déplacé des racines à l'abri desquelles il s'est situé dans un ensoleillement —peut-être aveuglant— vers le pli des ateliers français de Renault, pour en finir dans la chute du chômage à Aubervilliers. De qui sont-ils ces enfants, de quelle loi ? Il est évident que dans notre civilisation judéo-chrétienne, ce n'est pas la même chose de dire " Ismaël " que de dire " Abraham "... Il est évident que pour vous Ajar ou Agar la Misrit n'est rien du tout, n’est-ce pas ? Alors que, tout de même, elle est la mère d'Ismaël…

C) Acte éducatif, acte de médiation

Mais, enfin, il me paraît encore plus important aujourd’hui de vous dire que l'acte éducatif, doit advenir comme médiation, comme parole de médiation ; elle ne sera pas issue d'une “ merveilleuse ” connaissance du champ culturel de chacun et de sa spécificité, ni du roman familial où se situe l'histoire singulière de ces sujets à venir, mais de ce que vous aurez su écouter des interstices, des petites failles, des fentes par où traverse le peu d'heures qu'il nous reste pour avoir une relation les uns avec les autres. C'est-à-dire pour pouvoir se haïr gentiment les uns, les autres, et en bonne compagnie. Parce que, tout de même, il faut bien parler de la surdétermination 10 du désir, quand on prétend “ vouloir le bien de l’autre… 11 ” Moi, quand j'ai entendu parler pour la première fois de surdétermination , je ne comprenais pas ce que ça voulait dire ; je connaissais la prédétermination, le fatalitas que disait Rouletabille, ou le "Inch'Allah" que disaient d'autres camarades, mais alors la surdétermination… J'ai appris que cela voulait parler d'une pluri-détermination des éléments qui interviennent dans une situation , certaines déterminations étant conscientes, d'autres inconscientes… Ce qui veut dire que les choses sont plus compliquées que Daniel Bilalian veut bien nous le faire croire....

Il existe dans le champ du travail social un acte d'interprétation , c'est-à-dire quelque chose qui se produit, et qui, à se produire, déplace de manière radicale la situation telle qu'elle se posait au préalable. N'est-ce pas cela l'interprétation ?

Tout à coup, quelque chose se passe qui nous déplace, nous, vous aussi, parce qu'on parle tout le temps des affaires des autres, mais si l'on veut parler, il faut parler de tout, et alors nous sommes des nases parmi les nases , pour signifier grossièrement que la source de notre expérience se situe là où, dans notre histoire, une souffrance en nous est devenue parole . S'agirait-il de rester, comme on dit au football, en situation de "orsay", hors-jeu, hors de jeu... ? Regardez la télévision : depuis maintenant quatre mois, on nous parle de la dignité et l’on prétend, au niveau politique ou, surtout, au niveau médiatique —les journalistes ont largement ma préférence—, on prétend donc qu'il faut redonner la dignité . Et nous, de manière pantoise, benoîtement, nous continuons de nous empiffrer de petits pois carottes, quand ce n'est pas le jour des “ nouilles ” ou d'autres mets encore, pourvu qu'on ait une bonne cuisinière —je veux dire l'appareil, pas l'employée de maison—

Nous voici benoîts alors qu'on est en train de faire un acte de mépris. Acte qui tient en ceci : nous recevons comme indigne la souffrance qui s'étale et ce du fait qu'elle déborde et nous touche.

Mais la dignité ne tient pas à la richesse, ni au salaire ; la dignité tient à la capacité, pour chacun, de gérer sa liberté en usant de son nom propre, non ? C'est ça la dignité.

Ce que nous sommes en train de ravir, nous autres, à toute une partie de la population, c'est l’espérance, ce n'est pas la dignité.

C'est l’espérance 12 , vous le savez bien.

D'où venons-nous ?

Chacun de nous.

Que faisait notre arrière grand-père, notre grand-père, notre père et nous que faisons-nous ? Pourquoi se sont-il crevés à travailler si ce n'était dans l'espoir qu'à maintenir leur dignité, vous puissiez “ être mieux ”.

Alors le “ mieux ”, évidemment, était une nébuleuse qui, très souvent, s’attachait au statut social, au patrimoine, à l'argent, mais certainement aussi à la reconnaissance octroyée au statut social, ou à la fonction que vous rempliriez ; c'est à peu près ça.

Beaucoup venaient du monde paysan, d'autres venaient du monde ouvrier, chacun avait sa culture et sa dignité , il ne la perdait pas. L'une des meilleures manières de perdre la dignité, c'est de recevoir le salaire universel ; il faut faire attention à cela. Qui va me donner ma dignité ? Les journalistes ? Elle passerait par un “ emplâtre terreux ” sur ma figure ? Ou par un nœud de cravate, comme ça, montré à tout le monde ?

Mais la dignité tient, précisément à ne pas exposer ses nœuds ou ses maquillages ; c'est de l'obscénité et de l'imposture.

Alors, c'est bien parce qu’il se produit aujourd’hui une situation de cet ordre-là, que la question de la fonction paternelle se pose, ce n'est pas que la fonction déambule, c'est un système social qui peut se trouver en situation d'errance et —comme à l'époque de Galilée— l'institution peut nous dire : c'est le soleil qui tourne, pas la terre ; c'est la fonction paternelle qui évolue, pas la société.

Voyez. Et bien c'est faux : Galilée a dit “ et pur si muove ” “ pourtant elle bouge ”. C'est notre situation, c'est notre société qui subit une mutation, qui est en train de nous prendre un peu la tête, parce qu'une frange très grande de la population s'appauvrit et nos esprits avec. Ce n'est pas la même pauvreté, mais elle est tout aussi dangereuse ; parce que, si la capacité de penser se trouve colonisée par le tenant de telle ou telle discipline ou de telle ou telle secte, on éteint la lumière et l’on s'en va. Parce que, qu'est-ce qu'on fait ? Si dans une quête de sujet, on se trouve assujetti, où va-t-on ? C'est pour ça, je crois, que le moment est venu pour chacun de nous, de faire un peu quelques différences ; je ne prétends pas savoir à votre place, moi je suis venu travailler avec vous : donc, je ne suis sûr de pas grand-chose. Mais j'ai, cependant, un tout petit peu préparé quelques points pour voir si on peut “ différencier ”.

Bon, jusqu'à présent, on me comprend bien ? Alors, je vais essayer de poursuivre. Ainsi, nous allons considérer comme plutôt exact que la fonction paternelle ne bouge pas, elle ne varie pas, elle n'a pas varié, elle n'a pas évolué. Ce sont parfois les modes d'octroyer l'autorité parentale qui sont changés, que ce soit par la loi de 83 ou autre, enfin, je ne suis pas sûr de la date, je parle de cette loi qui établit que c’est la mère qui désigne le père . Ce que cette loi change n’est pas la fonction paternelle mais le mode d’attribution de l’autorité parentale. Il est, par ailleurs, possible que toute avancée juridique contienne, en elle-même, sa part de perversité, c’est assez commun dans les institutions humaines, et, du coup, des situations qui, au préalable, conduisaient à un statut de bâtard et son cortège de souffrances en rapport à une filiation, peuvent aboutir aujourd'hui à des mères qui veulent se penser “ toute ”, capables de tout assumer seules, et qui ne veulent pas du tout céder la partie. Ça, ça leur passera avant que ça me revienne....

D) La fonction paternelle comme tiers

Par contre, du coup, il est une fonction séparatrice qui a beaucoup de mal à s'exercer ; parce que si je suis toute , si je ne cède pas une partie , qu'est-ce qui sépare ? Voyez-vous ? ... Lacan rappelait, dans son séminaire 13 , la très riche polysémie de séparer : d’abord, bien sûr, le sens évident qui, dans séparer, trace une limite, divise , mais aussi, ce “ parer ” qui parle de parure , d’ornement, d’habillage de l’être avec les ornements de la puissance, du sentiment de totalité, et enfin ce sens que donne l’espagnol “ parir ”, à partir du latin “ parere ” et dont la langue française n’a gardé que l’expression technique de parturition . Peut-on s’engendrer soi-même ? Peut-on décider que, parce que “ je suis toute ”, l’enfant ne sera qu’ornement de mon être ? Peut-on, enfin, en donnant un sujet à la vie , convertir ce sujet en objet qui bouche nos trous, “ détroue ” nos vies, emplit ou comble un vide ?

Alors il ne faut pas confondre “ séparer ” et “ se parer ” comme on le ferait avec les jolis angelots, un peu grivois, qui vous regardent de leur air narquois dans cette salle remarquable, ce théâtre est un théâtre lyrique, n’est-ce pas ? Nous sommes dans un théâtre d’opérette, c’est la vie.

Sans cette séparation, Comment voulez-vous que quelque chose vienne dire, alors que vous tétez un sein remarquable, tendu, plein de lait, gorgé de miel, un sein qui vous rappelle, avant même de l'avoir connu, ce Cantique des cantiques que, plus tard, nommera l’espoir d’une terre promise 14 : “ Jeannette, où as-tu mis les chaussettes ? ”

Voilà la fonction paternelle....

Mais, est-ce bien cela la fonction paternelle ?

Ça n'a rien à voir avec l'autorité ; ce n'est pas le patriarcat, c'est :

“ Jeannette, où as-tu mis les chaussettes ? ”

Et voilà que Jeannette détourne son regard ravi et dit :

“ Dans le tiroir de la commode, en bas à droite ! ”

Et l'enfant, qui était là, ravi, dans son entourage paradisiaque, qui se dit :

“ Oh ! l’horrible femme, voilà ce que ce moment signifie pour elle. ”

Mais comme il est jeune, sans expérience, il replonge dans le regard de cette femme, qui lui veut tout, qui lui vaut tout, et re-tête, et la regarde ravi, envahi de lait, et tout à coup, il entend : “ Je ne les trouve pas ! ”

Et, de nouveau, la mère détourne le regard, et dit :

“ Ben, cherche ! ”

Vous ne le saviez pas ? Je ne vois pas à quoi d'autre ça pourrait tenir la fonction paternelle, à quoi d’autre qu’à dire, à signifier, à montrer, à produire un acte par lequel nulle complaisance ne vient permettre la fusion de deux êtres et une parole vient produire, dans la loi, la fonction de la séparation. C'est tout !....

Alors, vous pouvez dire “ Jeannette, où as-tu mis les chaussettes ? ”, sans souci des formes ou d’effet rhétorique, mais d’une position comme lorsqu’il est dit : « Dieu dit : Qu'il y ait un firmament au milieu des eaux et qu'il sépare les eaux d'avec les eaux et il en fut ainsi. 15 ” Voyez-vous ? C'est la même chose... C'est la même chose, au sens de la division : c’est un acte de séparation.

Eh bien la fonction paternelle tient en ceci qu'elle trace une division qui marque à jamais l'être de son incomplétude en même temps qu’elle lui permet d’en définir le contour le plus précis. Et c'est ça, la loi.

C'est tout de même relativement simple. Mais pas tant que ça ; sinon ça se saurait....

E) Père du désir, père de la loi : la castration

Regardez, par exemple, pourquoi FREUD a choisi Moïse, l'histoire de Moïse dans l'Exode , pourquoi n’a-t-il pas choisi Jacob ? l'histoire de Jacob dans la Genèse ?

Est-ce qu'elles ne sont pas comparables d'un côté, et, d’un autre, tellement différentes ?

Et quelle est cette différence ?

Est-ce que pour les travailleurs sociaux, il ne serait pas plus intéressant de travailler Jacob plutôt que Moïse ? Parce que Moïse, vous me le faites tous les jours : le Moïse des commandements, dans cette appropriation pharaonique que vous faites des usagers dans l'institution !

Si je le “choppe”, —je suis éducateur pit-bull— je ne le lâche plus.

Il convient de marquer des différences vous disais-je au début ; je suis tout à fait d'accord, avec Edwige RUDE-ANTOINE dans ses propos sur l’importance de la généalogie. Mais il me semble qu’il convient de séparer l'inscription dans la lignée et l'identification à une figure paternelle , je crois qu'il convient de les séparer pour ne pas confondre, comme le fait Nicole JEAMMET, le père de la lignée, c’est-à-dire le père du nom , avec l’idéal du Moi .

Dans Les destins de la culpabilité, Nicole JEAMMET nous dit que Moïse avait un père. Je ne comprends pas pourquoi elle le dit. Pourquoi dit-elle que ce “père” était un père alors que c'était un “beau-père” ? : « Ce nouveau “père” qui établit un étranger chez lui allant jusqu'à lui donner sa fille vient en revanche totalement contredire son premier père égyptien —évidemment c'est de Pharaon que l'on parle— qui ne savait que chercher à faire mourir ses rivaux potentiels 17 . » Je trouve ça un peu tiré par les cheveux… Il me semble que la lignée , l'inscription dans une généalogie , n’est pas la même chose que l'identification à une figure parentale , quelle qu'elle soit. Si nous suivons Madame Jeammet, dans le cas de Moïse, ce sont des identifications légèrement incestueuses (le père de sa mère adoptive, le père de sa femme). Dans l’expression : “ identification à une figure parentale ”, c’est le terme figure , qu’il convient de retenir ; la figure n’est pas l’inscription , encore moins l’incarnation , même s’il peut se faire qu’il y ait des figures qui s’incarnent dans l’acte de parole ; l’imaginaire seul ne peut pas inscrire le réel, il y manque la parole, la parole dans sa dimension symbolique d’acte de parole , un acte, pas du verbiage.

Voyez-vous, deux éléments ne tiennent pas sans cet autre qui fait tiers et les différencie en même temps qu’il les fait tenir ensemble ; mais ce n’est pas le Nom-du-Père , ce n’est pas un quatrième terme comme marque des origines. Père adoptif, beau-père… La virilité n’est pas requise pour faire figure … Ce peut être une femme, un homme… Un objet, un livre, une table, enfin, tout un tas de choses peuvent faire séparation, peuvent faire coin, peuvent faire, tout à coup, entame entre un garçon, ou une fille et leur mère, et signifier : “ Cette porte t'est fermée, va ailleurs, ton chemin est ailleurs, d'un autre côté, mais dans une lignée et avec un support ”. Et voyez-vous, quand un tabouret a trois pieds, il tient, tout autant que quand il en a quatre 18 , n’est-ce pas ? Le problème, c'est que si vous enlevez l'un des pieds d'un tabouret à quatre pieds, il tient toujours un peu. Alors que si vous enlevez un pied d’un tabouret à trois pieds, alors là, je doute beaucoup qu'il tienne, voyez-vous ?

Ceci pourrait figurer la différence que font les lacaniens entre le nœud à trois et le nœud à quatre , entre la structure de la névrose et celle de la psychose, quand le Nom-du-Père ne noue pas le réel avec le symbolique et l’imaginaire ; le Nom-du-Père voilà le quatrième pied du tabouret.

La métaphore du tabouret, chez Lacan, est expressive, elle est plus claire et l’on se complique moins la vie ! Non ? Je veux dire que ça vous parle, n’est-ce pas ? Les tabourets à trois pieds, vous les voyez ? Or, me direz-vous —je sens que vous le pensez—, et le tabouret de la laitière ? Il n'a qu'un pied celui-là. La boucle est bouclée : “ Jeannette où as-tu mis les chaussettes ? ”, est un pied de nez , une voix d’un seul tenant, d’une seule position, le tabouret à un seul pied contraint la laitière à tenir une position.

Une voix se laisse entendre qui instaure la séparation entre deux.

Effectivement, entre deux, il faut qu'il y ait toujours une figure du tiers , cette figure du tiers, cette figure séparatrice est, en tant que telle, la référence que le travailleur social peut faire à la fonction paternelle.

Deux mots sur Moïse et Jacob ; pourquoi vous dis-je, que les éducateurs, les travailleurs sociaux auraient intérêt à travailler Jacob ? Eh bien c'est très simple. Connaissez-vous les deux récits ? Non ? Eh bien il faut les lire, parce que je ne vais pas vous raconter maintenant la Genèse et l'Exode , ça fait dix chapitres de la Genèse et tout l'Exode, et il est 4 heures moins 20, et il faut que j'arrête à 4 heures, et si je veux un quart d'heure de plus, mais moi je suis à mon premier point, alors...

Eh bien, un mot seulement. Voyez-vous, le problème… Trois ou quatre mots seulement : Moïse, si vous regardez le texte, mais il faudrait le regarder à la loupe, mais il faut que je termine rapidement, alors vous me croirez sur parole, et puis vous corrigerez quand vous regarderez le texte, comparez, je vous prie les trois traductions qui sont intéressantes pour cette affaire, la Bible de Jérusalem 19 , celle de la Septante 20 , c'est-à-dire la Bible d'Alexandrie , et puis, de temps en temps, vous regardez celle de Chouraqui 21 pour voir, pour trancher entre les deux ; et là, ça marche bien... si, si... regardez bien la 3, la 2 et la 1.

Alors, je crois qu’avec ces références, vous pourrez arriver aux mêmes conclusions que moi ; il me semble, en effet, que Moïse inscrit le père de la loi , alors que Jacob situe le père d'un désir . Je crois que ça, c'est fondamental. Moi, au cas où je n'aurais pas le temps de faire ma conférence, je vais vous dire ce que je suis venu vous dire : si le travail éducatif culmine au Surmoi , et bien vous transformez des exclus en masochistes ; d'accord ? Si le travail social culmine du côté de la joie, alors je pense que vous pourrez dire que vous vous êtes référés à une éthique de l'acte éducatif , et que, peut-être ça a servi à quelque chose que vous vous compliquiez l'existence. Bon !

Maintenant, je vous ai dit ça, ça c'est “ ma conférence ”, et je poursuis parce que autrement je ne vois pas comment je vais aboutir.

Le problème qui se pose aujourd'hui entre nous, c'est que le travail éducatif est ambigu parce qu'il prône une espèce de fonction paternelle qui serait rigoureuse et masochiste , c'est-à-dire une fonction où l'idéal du travail éducatif trouverait sa consistance lorsque l’usager parviendrait à l'obéissance à la loi, par une sorte d'intégration, peut-être, de rapport à la castration mal compris, et qui tient dans l’asservissement d’un sujet, dans une servitude du sujet, une soumission contrite aux injonctions du surmoi (que le travailleur social brandirait goguenard). Voyez-vous ?

Et bien, non ! le travail éducatif n’est pas seulement cela. On peut se soumettre à la loi, certes, si on veut, mais l’enjeu, c’est de rester créateur au sein de cette loi, oui ! Et l’on peut vivre la liberté dans la loi . Ce qui est intéressant dans cette affaire de la fonction paternelle, tout de même, c'est qu'à un moment donné le rapport à la loi transforme la loi ; voyez-vous ? L’intégration de la loi subvertit la loi, attention ! subvertir 22 , n’est pas la même chose que transgresser 23 , le bouleversement subversif fait fleurir la loi, il la rend inventive, il la sort de la répétition jaculatoire 24 où elle se niche par peur du danger, parce qu'il est plus commode de subir l'interdit que de risquer de se planter, c'est-à-dire d'encourir la castration 25 . C'est bien ça ; quand on ne fait rien pour ne pas prendre de risques, c'est bien ça dont il est question.

C'est pour cela que je vous dis que dans l'histoire de Jacob, il y a un parcours qui me semble intéressant ; au contraire de Moïse, Jacob est fils d'un désir, il a une origine ; quelle est l'origine de Jacob ? tout de même. De qui est fils Jacob ? D'Isaac. Parce que Isaac lui-même, il est fils de quelqu'un : d'Ibrahim, d'Abraham. Il vient, voyez-vous, de ce qu'on appelle le cycle des patriarches, d'une lignée.

Quand Jacob, —en Hébreu cela veut dire le talonneur , ça ne veut pas dire, “ t'as l'honneur ”, voyez ça n'est pas “ t'as l'honneur d'être né ”, c'est “ je te tiens le talon. Pourquoi ? parce qu'il naît après le Rouquin, Ésaü, Edom , je crois qu'ils l'appellent, hein ? “ le Rouquin ”, et qu'est-ce qu'il va faire Jacob ? Eh bien il va acheter ce qu'il désire. Qu'est-ce qu'il désire Jacob ? Il veut le droit d’aînesse, c'est-à-dire obtenir la bénédiction destinée à l'aîné.

C'est quoi obtenir la bénédiction de l'aîné ? C'est fonder une lignée, c'est s'inscrire dans la lignée et fonder la sienne, c'est ça qu'il veut.

Il le veut à tel point qu'il l'achète à Ésaü avec le plat de “ roux ” qu'il a préparé, de lentilles, si vous voulez, parce que j'imagine mal, voyez-vous, les lentilles là-bas, mais enfin… Vu la quantité d’eau qu'il faut pour faire une lentille… Bon, mais enfin, la Bible dit : « Ésaü dit à Jacob : Laisse-moi avaler ce roux, ce roux-là ; je suis épuisé. - C'est pourquoi on l'a appelé Édom.— » Il avait préparé un roux, voyez-vous ? Eh bien, après, qu'est-ce qui se passe ? Isaac se fait vieux et la mère de Jacob appelle Jacob et lui dit : ton père va mourir sans t'avoir donné sa bénédiction ; maintenant qu'Esaü est absent, va, tue un mouton, je vais le préparer à la façon que ton père aime, et tu vas le lui porter pour lui demander sa bénédiction. Et Jacob lui dit : eh !...oh !... Si je trompe mon père ce n'est pas sa bénédiction que je vais avoir, c'est sa malédiction ! Et que dit la mère à ce moment ? Sa malédiction sur moi, mon fils, va et fais comme je te dis 26

Lisez-le, elle dit pareil que vos mères, “ Si tu fais ce que je te dis, —c'est au nom de ton bien que je te parle— tu seras heureuse, tu seras heureux, fais comme je te dis ”.

C'est la même chose. Et cela ne suffit pas ; il obtient la bénédiction, mais il a peur de la vengeance d'Ésaü et il s'en va loin, il va chez Laban ; il épouse ses filles, il passe des années, il travaille, il engrange des biens, il gagne et se dit : je m'en vais revenir vers mon frère et lui envoyer des messagers afin de faire baisser son courroux. Ne me croyez pas sur parole, allez lire, je parle de mémoire aujourd’hui.

Et il lui envoie des messagers, voyez-vous, il lui envoie des messagers avec des biens, il fait traverser les siens, et lui il s'arrête fatigué ; et pendant qu'il dort, un messager arrive qui lutte avec lui toute la nuit ; et lui, il ne cède pas ; Jacob ne cède pas et, à la fin, l'aube arrivant, le messager lui dit “ arrête, je ne peux pas te vaincre, tu ne peux pas me vaincre, arrête ”. Et Jacob lui dit “ Je n'arrêterai pas avant que tu m'aies donné ton nom, quel est ton nom ? " Et l'autre lui dit — et vous pensez tout de suite à l’Exode , quand Moïse demande à Iahvé “ quel est ton nom 27 ? ” Comparez, regardez—, et le messager dit à Jacob : “ Que t'importe mon nom, désormais tu t'appelleras Israël parce que tu n'as pas cédé 28 ”.

Alors que dans l’Exode , Iahvé dit à Moïse : “ [ hyha rva hyha ] Eyé asher eyé , je Suis celui qui Serait 29 ” c'est-à-dire quelque chose comme “ je suis celui que je deviens au jour le jour au gré de votre chemin ”.

Ce qui nous intéresse, ce qui me semble concerner les travailleurs sociaux par rapport à la fonction paternelle, c'est bien cette acquisition graduelle de la loi, vous voyez ? Nous ne sommes pas dans l'obéissance aveugle, dans la cuisine de la loi Duralex , “ Dura lex sed lex ” la loi est la loi et même si elle est rigoureuse, vous devez y obéir.

Il y a quelque chose d'un accompagnement qui va faire à un moment donné médiation .

Il est fils d'un désir , Jacob s'origine dans une lignée , mais il y a aussi le désir de sa mère qui le préfère, —j'ai oublié de vous dire que quand ils sont nés, il est dit : Jacob était un homme des tentes, un homme juste, un homme paisible, Ésaü un chasseur.

Voyez-vous, la mère préférait Jacob, le père aimait ce qu'Ésaü lui portait, d'ailleurs les pères sont plus concrets, on vous dira aussi avant de vous marier : “ Fais-lui des bons petits plats, tu l'auras toujours à la maison. ”

La fonction paternelle est intéressante.

Bon l'histoire, ça va l'histoire de Jacob ?

Vous avez compris comment le désir traverse des états successifs, et combien il est loin d’être pur et angélique ; le désir, chacun de nous porte en lui du désir de sa mère, de son père, parfois même de ses aïeux. ; N'est-il pas dit dans la Bible ? : « Qu'avez-vous à répéter ce proverbe au pays d'Israël : Les pères ont mangé des raisins verts, et les dents des fils ont été agacées 30 ? »

Et vous le voyez tous les jours, quand même, comment les échecs du désir des parents font des caries aux dents des enfants, des enfants qui se retrouvent tarés dans les I.M.P.P., et vous les rencontrez tarés de ce poids des mots qui ne leur ont pas été dits.

Et la mère ? Quelle est la fonction de la mère ? Voilà la fonction du père qui déambule alors que la mère, assise dans son coin, reprise les chaussettes.

Et la mère dans tout ça ? Si le législateur légifère, c'est n’est pas parce qu'il s'ennuie et qu'il ne sait pas quoi faire, c'est parce qu'il veut à chaque fois rendre la loi libératrice, et la mettre au pas de l'évolution ou des mutations ou des transformations sociales.

Tout à l'heure, vous avez dit que maintenant l'avortement était permis , et j'aimerais vous dire qu'il est dépénalisé ; de mon point de vue, la différence entre ces deux termes est essentielle. L'interruption volontaire de grossesse —que l’on désigne, populairement, par l’avortement— n’est pas permise, elle est dépénalisée.

Si l’on se tient aux conditions prescrites par la loi, l’acte d’IVG n'est pas pénalisé.

C’est important parce qu’il me semble qu'une société n'a pas à permettre qu'une femme ait ou n'ait pas du désir, elle ne peut que préserver puis, prendre acte, sans punir forcément, de l’énoncé du désir d’un sujet et de l’ambiguïté où il se constitue ; il me semble, je crois qu'on peut se mettre d'accord là-dessus.

Pourquoi insister là-dessus ? Parce que tout de même, le père dont vous parlez, qui est en fait le géniteur , vous savez ce que dit mon ami Joël DOR dans son livre tout à fait remarquable 31 ? : “ Autant le géniteur peut-il légitimement postuler au titre d'ambassadeur privilégié de la fonction paternelle, autant n'est-il jamais qu'un cas de figure possible requis par l'exigence de cette mission de représentation ” ; c'est-à-dire : qui que nous soyons, quoi que nous soyons, la fonction paternelle n'est pas un titre ou quelque chose qui fasse partie de notre chair, c'est une représentation.

La fonction paternelle est une position, elle n’est pas un être. D'ailleurs vous savez que Maud MANNONI disait 32 : “ lorsque le père du fantasme coïncide avec le père de la réalité, c'est la psychose ”, et elle s’appuyait sur cette remarquable Lettre au père 33 , de Franz KAFKA que vous connaissez sans doute, qui est parue chez Gallimard, je vous conseille sa lecture, elle est belle, elle est superbe et elle nous parlera, à chacun de nous ; ou alors de ce père de Schreber, du cas de FREUD 34 .

Il nous faut avancer, le texte de la mère est la texture de l'être du fils , c'est ça que je voulais vous dire ; qu'est-ce que c'est que cette histoire-là ? Quand on dit, quand LECLAIRE 35 disait : il faut tuer l'enfant du désir de la mère en chacun de nous ; moi, ça m'avait frappé ; j'étais jeune à l'époque et l’on se frappe plus quand on est jeune, parce qu'on se fait moins mal ! Et donc, je me disais, c'est vrai, c'est tellement vrai ça, il faut tuer en nous l'enfant du désir de la mère, c'était un peu compliqué, mais je le voyais bien.

C'est-à-dire que chacun de nous sait très bien quel est l'enfant idéal que la mère a dans sa tête et chacun de nous voudrait y ressembler ; et à force de vouloir y ressembler, à un moment donné, nous sommes complètement perdus, nous ne savons plus où nous allons, nous nous disons :

“ Mais pourquoi je fais ça ? Qui est-ce qui a voulu ça à ma place ? Veux-je ou suis-je voulu ? Est-ce que je veux quelque chose, ou est-ce que je suis voulu par quelque chose ? Quelle est cette répétition qui m'envahit, qui me condamne, qui m’empêche d’advenir ? ”

Et voilà le problème, c'est que tu es fait de texture , c'est-à-dire que tu as appris les mots de ta mère et le texte de ta mère, et ces mots de la langue maternelle constituent ta propre texture, et si tu romps avec elle, tu as peur de te trouver tout débraillé, de t’effilocher.

Vous comprenez ?

On s'effiloche, on ne peut pas, comme ça, rompre avec sa mère, ce n'est pas évident cette histoire.

Vous vous rendez compte que je vous parle plutôt des éducateurs que des usagers , mais —des usagers— tout le monde en parle, alors…

F) Se rétracter, Disparaître :

L’enfant est mon pair en devenir

Allez, c'est le matin de bonne heure ; voyez, il est 7 heures ; le temps passe très vite, c'est-à-dire que c'est ce moment où le temps se précipite, se rétrécit, parce qu'il faut arriver à l'heure à l'école, et que la fillette n’est pas encore coiffée ; alors, elle veut un kiki : "Papa, tu me mets un kiki ?" - "je te mets un kiki !" ; le père prend alors le kiki, il est plus ou moins adroit, il prend le kiki et les cheveux, et il fait un tour, et un autre tour, et au troisième tour, ça ne passe plus ; alors, il tire le kiki, pour faire place à un troisième tour, et il essaie de faire passer la masse des cheveux. Et il ne peut pas ; il est face à cet impossible aussi menu qu’irritant, lorsqu’il voit passer son fils aîné qui s’apprête à partir à l’école ; il lui dit : “ Oh ! Eh ! Viens là ! Aide-moi ! Tiens par là, mets les doigts là, que je mette là pour enserrer… ”. Et le fils arrive, et il met les doigts, mais où ? Dans le kiki, dans les cheveux ? Il dit : “ Et où je mets mes doigts ? ” Et le père, énervé, lui dit : “ Mais vas-y, mets-les !... ”.

“ J'arrive pas ” dit encore le fils qui commence à s’émouvoir.

À la fin, le fils est tout autant énervé que son père, et, ne sachant que faire, il met les doigts dans le trou que lui fait son père ; celui-ci explose alors : “ Mais enfin, tu es fou ”, lui dit-il, “ Tu ne comprends pas ? Tu as bien entendu que je t'ai dit de le prendre à l'extérieur, à l'ex-té-rieur ! ! ! ”

Les cris du père mettent l'enfant au bord des larmes, c'est injuste, la colère du père est, comme ses cris, trop forte, énorme, l'enfant respire et finit par oser dire : “ Mais comment veux-tu que je le fasse ? À l'extérieur, il y a tes doigts ! ”

Être père en fonction , conduit parfois aussi à se prendre les doigts dans les bords du trou, de celui du kiki ou d’un autre. Nous sommes alors dans la confusion , et contre toute évidence demandons l'impossible : Que quelqu'un fasse quelque chose au lieu même où nous refusons de nous effacer , notre parole devient alors du persiflage 36 .

Voyez-vous, on ne peut pas, non plus, être père comme notre mère voudrait que nous le soyons. Il s'agit dans le texte de notre mère, qui fait notre texture de trouver les paroles séparatrices pour ne pas nous effilocher, et cesser de demander d'être aimé, pour devenir amant.

Une dernière anecdote : c'est mon ami, Xavier Audouard, un homme et un psychanalyste extraordinaire, qui vient de publier ce texte dont je vous parlais tout à l’heure à propos de l’acte : Sortir de la croyance l'ici au-delà . Il y raconte une anecdote qui est fort belle et tout à fait en rapport avec ce que je suis venu vous dire : “ Nos fils sont nos pères 37 ” ; voyez-vous ? C'est important, parce que si nos fils ne deviennent pas nos pères, la fonction paternelle aura été soit du côté de l’imposture, soit du côté du ratage.

Attention ! Le travailleur social n'est pas là pour être le vigile de gosses qui font l’idiot ! Il est là parce qu’il croit que quelqu'un peut advenir là où il est lui-même ; Ce qui veut dire qu’il se croit mortel, qu’il a vécu sa propre disparition dans le registre du symbolique. Ceci est sérieux, sans cela l’éducation devient un gardiennage qui aboutit soit à la débilité , soit à la délinquance dans le meilleur des cas.

Nos fils sont nos pères parce qu'ils nous indiquent le chemin ; ils nous indiquent le chemin de la paternité.

Et comment le raconte-t-il, alors, Xavier Audouard ?

Voici qu’il était à la piscine avec son fils, et il perçoit le plongeoir qui est à 5 mètres et, l'air prétentieux comme ça, il fait le “ Jacquot ”, et il dit à son fils : “ Alors, quand est-ce que tu plonges du grand plongeoir ? ”

Alors, son fils qui est dans l'eau, qui patauge sans doute, qui commence à nager, le regarde et répond : “ Mais papa, quand t'auras plongé toi-même ”. Et alors, Xavier Audouard, qui est gentil, qui est beau, qui est élégant, qui est surtout attentif à la droiture, mais enfin, question Tarzan , il y a mieux, Xavier, vous dis-je, monte au plongeoir, puis regarde en bas : 5 mètres. “ Je vais me tuer, se dit-il, c'est pas possible. ” Il s'avance, il recule, vous savez ce que disait le classique : “ Lorsque l'ardeur s'accroît, l’effet se recule. ” Il décide alors de laisser l’affaire pour une prochaine fois et songe à descendre. “ Je laisse à mon fils un délai pour grandir, se dit-il empli tout à coup d'une honnêteté de mauvais aloi. ” Mais, au moment où il va redescendre, un jeune homme de 12 ans, qui montait l'escalier, lui dit : “ C'est pas par là, Monsieur, c'est par là, —indiquant du doigt le côté plongeoir ”. Soumis à ce commandement, au commandement de celui qui deviendra père un jour, Xavier se tourne et plonge. Et il conclut : “ Nos fils sont nos pères ”.

Vous voyez, la culpabilité , ce n'est pas la même chose que la responsabilité . C’est ce que me disait une assistante sociale d’AEMO dans un travail de réflexion sur sa pratique.

La culpabilité, c'est la complaisance dans cette faute de notre histoire qui nous rend impossible de continuer de vivre et nous soumet à la répétition. La culpabilité regarde et touche à l'histoire . La responsabilité, c'est le fait de se sentir capable de faire face aux conséquences de nos actes, voyez-vous ? Dans le Travail Social, il faut cesser de regarder la culpabilité, c'est-à-dire de plonger dans l'histoire et le sens, pour se poser la question des conséquences et accompagner les usagers dans ce faire face aux conséquences , soit à l’acte pour que le travail social s’effectue et transforme le passage à l’acte — par le biais de son interprétation— en passage à la loi .

En faisant face aux conséquences du passage à l’acte, le travail de l’éducateur peut faire passage du désir en souffrance à une loi qui libère .

G) Pour Conclure sur l’amour

C'est la seule manière de passer du surmoi à la joie . Se demander et se dire : “ À quoi cela sert-il de vivre, de perdurer, si ce n'est dans l'horizon de l'amour ?

À quoi sert de se risquer à cette présence d'un homme et d'une femme ensemble, si ce n'est pour inventer chaque jour l'amour ?

Si cet amour de la différence, ou de l’inconscient, ou de la vérité, ou du désir —Chacun trouvera le signifiant qui lui correspond le mieux—, si cet amour n'est pas la question de chacun de nous, vivre et agir deviennent obscènes. L’amour comme question, tout autant dans le cas des usagers que dans celui des travailleurs sociaux ; l’amour comme pari d'éternité , comme pari de créativité , comme question posée à notre propre énigme . L’amour comme manière de s'interdire de dire à l'autre ce que l'on saurait à sa place, parce qu'on comprendrait son avenir mieux que lui-même. Alors que, dans l’intime, nous en sommes à nous demander : “ Mais est-ce que je l'aime encore, est-ce qu'elle m'aime encore, est-ce que, malgré ce que l'âge nous fait à chacun de nous, nous continuons de vouloir vivre et mourir ensemble ; est-ce que lorsque les enfants s'en sont allés, ça vaut la peine encore, ou plutôt, allons-nous jouer aux tarots le reste de nos jours ? Est-ce que, notre couple signe une aliénation réussie, lorsque, au bout de 20 ans, nous finissons par nous ressembler, ou est-ce que l’on continue, encore et encore, à livrer cette “ guérilla sans reproche ” dont nous parle René CHAR dans la Lettera amorosa . Écoutez, c'est magnifique :

Je ne puis être et ne veux vivre que dans l'espace et dans la liberté de mon amour. Nous ne sommes pas ensemble le produit d'une capitulation, ni le motif d'une servitude plus déprimante encore. Aussi, menons-nous malicieusement l'un contre l'autre une guérilla sans reproche 38 .

Parce que j'accepte d'être l'homme d'une femme, parce que j'accepte de me confronter au risque de la désirer chaque jour, de ne pas comptabiliser ce qu'elle me raconte lorsqu'elle “ me fait des accroires ”, lorsque j’accepte qu'elle m'envoie paître à chaque fois que j'essaie de lui faire subir ma force ou mon aliénation, lorsque nous apprenons, dans notre conjugaison réciproque, à tirer la corde du bon côté pour rétablir l’équilibre, alors, elle peut m'autoriser à lui faire la loi, parce que je suis son homme . Mais je ne pourrai lui faire la loi que si elle m'y autorise. Ce n'est pas parce que je l'aurai asservie, autrement mes tentatives seront dérisoires et la fonction paternelle ne peut pas s’effectuer dans la parole d’un homme qui ne fait pas la loi à sa femme.

La question de la fonction paternelle nous conduit, pour conclure, à maintenir, envers et contre tout, que l’on peut désirer autre chose que la répétition de la souffrance , que pour cela on peut accepter d'être l'homme d'une femme , comme elle, elle peut être la femme d'un homme .

Et, voyez-vous, ce n'est pas la culpabilité, mais la responsabilité qui produira comme conséquence d'avoir des enfants. La famille ne commence pas avec l’enfant, mais avec la parole entre un homme et une femme. Vous n'êtes pas fautifs d'avoir des enfants. Vous comprenez ? Mais les usagers non plus, ils ne sont pas fautifs d'avoir des enfants, ils en sont responsables. Bien sûr que l'univers de la faute les envahit continuellement ; bien sûr que, la plupart des fois, ils partent dans l'errance parce qu'ils se sentent dans la culpabilité de ce qu'ils n'ont pas su être.

Mais le travail social, lorsqu'il introduit la fonction paternelle, consiste en ceci, qu'il n'a pas à juger de la culpabilité, mais à maintenir une médiation pour assumer les conséquences, c'est-à-dire qu'il restaure la fonction paternelle dans le chemin de l'amour .

Et il faut qu'il sache, et j'en aurai fini par là, puisqu'il le faut… Il faut qu'il sache, le travailleur social, que la seule déviance à absolument éviter, et c'est par ces deux paragraphes que je vous remercierai de m'avoir supporté durant 1 heure 6 minutes, la seule déviance à absolument éviter, serait :

Cette prétention bouclée sur soi qui nous rendrait sourd et aveugle, comme cet étrange péché contre l'esprit dont la morale ordinaire ne sait rien, ne dit rien. Il arrive à certains de ne goûter que l'absence et l'épreuve. Si quelqu'un se trouve alors sans dieu, sans pensée, sans image, sans mot, reste du moins pour lui ce lieu de vérité : aimer son frère qu'il voit. S'il ne parvient pas à aimer parce qu'il est noué dans sa détresse, seul, amer, affolé, reste du moins ceci : de désirer l'amour. Si même ce désir lui est inaccessible à cause de la tristesse et la cruauté où il est comme englouti, reste encore qu'il peut désirer “ désirer l'amour ” ; et il se peut que ce désir humilié, justement parce qu'il a perdu toute prétention, touche le cœur du cœur de la divine tendresse. Ce n'est pas sur ce que tu as été, mais sur ce que tu es que te juge la miséricorde. C'est sur ce que tu as désir d'être ; il n'y a pas d'homme condamné 39 . ”

Je vous remercie.

Discussion avec la salle

Monsieur GÁRATE-MARTÍNEZ :

Je crois qu’il est très important, pour chacun de nous, que nous puissions nous référer à la violence autrement qu'en termes de haine des autres , c'est-à-dire haine de la manière dont les autres jouissent ou ne jouissent pas.

La violence n’est pas un mal en soi. Chacun de nous a fait violence à son enfant pour qu'il mange : c’est au moment où les dents poussent, que, pour aider à percer la gencive nous commençons à nourrir l’enfant avec la cuillère, et la cuillère fait violence aux gencives, mais, en leur faisant violence, elle permet aux dents de percer et, par là, l’enfant acquiert une forme d’autonomie. On peut ainsi proposer qu’il y ait deux formes de violence : la violence créatrice et la violence aliénante .

Il me semble que, dans le travail social, la question de la fonction paternelle doit être considérée toujours en parallèle avec la question de l’inceste, l’inceste compris au-delà de la violence sexuelle avec aggravant, l’inceste comme négation de la séparation.

On entend dire ici ou là : “ Les magistrats ne nous comprennent pas ” ; les magistrats pourraient dire : “ Les éducateurs, les travailleurs sociaux nous envoient des rapports auxquels on ne comprend rien… ”

C’est comme si on traversait des murailles pour soutenir notre propre narcissisme, pour soutenir notre être ; et comme s'il y avait un accord de non-agression les uns avec les autres pour dire “ Bon, on ne se comprend pas du tout, on n'entend rien à ce que l'autre dit, on ne comprend pas les références des autres, mais nous sommes du bon côté de la loi ”. Et ça nous rassure.

La violence fait partie de la vie, ce que nous pouvons essayer de comprendre, c'est précisément comment ne pas être complaisant envers les actes de l'autre, sans être pour autant le vigile du respect d'une loi dont on n'est pas sûr qu'elle ait été intégrée.

Que penser d'un citoyen quel qu'il soit lorsqu'on est mis en présence de quelque chose qui nous semble obscène ?

Voyez-vous. Que penser d'un éducateur qui se met à décrire complaisamment la souffrance d'une famille qu'il a en charge de conduire ou d'accompagner ?

Que penser quand on est en présence de cela, de ce partage obscène ?

Que penser, effectivement, quand on est face à un délit et en quelle position devons-nous nous situer en présence de ce délit ?

Chacun de nous se pose cette question ; quand est-ce que c'est au nom de la loi que j'agis et dans la position qui m'est dévolue, c'est-à-dire qui m'est assignée ?

Un magistrat n'a pas à s'interroger sur les complexes d'Oedipe pour trouver qu'il est obscène de battre un enfant… De la même manière qu'un psychanalyste n'a pas à corriger la vie des hommes, mais à écouter ce qui est en souffrance dans ce qu'ils disent ; et si chacun de nous se trouve à une position donnée, et bien je crois qu'à ce moment-là, la loi est extérieure à nous et nous avons à y obéir, pour êtres libres… ”

1 Psychanalyste , Membre d'Espace Analytique, Association de Formation Psychanalytique et de Recherches Freudiennes . Docteur en Sciences de l'Éducation. Professeur Associé à l'Université Bordeaux I.

2 Aux Journées d'étude du CIAE de Pau, « l’Évolution de la fonction paternelle », au Théâtre St.-Louis le 6/03/98.

3 Luria, Isaac ; En plaçant à l’origine du monde le drame cosmologique de la rétraction (tsimtsoum) de la lumière divine.

4 Soit par un seul point de contact.

5 L'autorité parentale.

6 Audouard, Xavier ; Sortir de la croyance, l'ici au-delà , éditions L'Harmattan, Paris 1998.

7 Dar a luz.

8 L'un des livres de la Kabbale .

9 Gárate-Martínez, Ignacio ; L’honneur et l’idiot , in Jeddi, Essedik ; Psychose, Famille, Culture , aux éditions de l’Harmattan, Paris 1985. Cf. aussi le projet de recherche en annexe.

10 Détermination multiple, qui est déterminée par plusieurs choix.

11 Pour traduire l’expression avec laquelle Saint Thomas définit l’amour : Amare (est) velle bonum alicui [Aimer c’est vouloir le bien de l’autre]. Freud et la théorie de la psychanalyse nous ont appris à quel point l’oblativité, le désir de “ se donner aux autres ”, correspond à une pulsion agressive inconsciente.

12 Nous comprendrons l’espérance comme étant sans objet précis, espérance d’un “ à venir ” imprévisible, attente sans objet ; l’espoir nous le comprendrons dès lors, pour différencier les termes, comme attente d’un objet précis, à situer du côté de l’imaginaire.

13 Lacan, Jacques ; séminaire XI, 1964, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse , séminaire établi par J.A.M., Paris, Seuil, coll. Le Champ freudien , 1973, p. 194.

14 Le Cantique des cantiques, Bible de Jérusalem, 4 , 5 : “ Tes deux seins, deux faons, jumeaux d’une gazelle, qui paissent parmi les lis. ” Aux éditions du CERF, p. 952.

15 Genèse 1 , 6. Bible de Jérusalem

16 Genèse 2 , 18.

17 Jeammmet, Nicole ; Les destins de la culpabilité , Presses Universitaires de France, Paris 1993. p. 73

18 Lacan, Jacques ; séminaire III, 1955-1956, Les Psychoses , séminaire établi par J.A.M., Paris, Seuil, coll. Le Champ freudien , 1981, pp. 228-229, à propos des points d’appui signifiants qui soutiennent le petit monde des petits hommes solitaires, et de la forclusion du Nom-du-Père.

19 Au CERF.

20 Tomes I et II, au CERF.

21 Ed. Desclée de Brouwer, Paris, 1985.

22 Bouleverser l'ordre existant.

23 Enfreindre un ordre, une loi, une obligation.

24 Prière courte et fervente.

25 Lacan, Jacques ; séminaire VII, 1959-1960, L’Éthique de la Psychanalyse , séminaire établi par J.A.M., Paris, Seuil, coll. Le Champ freudien , 1986, p. 354.

26 Gn. 27 , 13 : « Mais sa mère lui répondit : Je prends sur moi ta malédiction, mon fils ! Écoute-moi seulement et va me chercher les chevreaux. »

27 Chapitre 3 , 13 : Moïse dit à Dieu : « Voici, je vais trouver les Israélites et je leur dis : "Le Dieu de vos pères m'a envoyé vers vous." Mais s'ils me disent : "Quel est son nom ?", que leur dirai-je ? »

28 Cette version, rappelée de mémoire, est inexacte ; Dans la version de la Bible de Jérusalem , la question sur le nom vient en deux temps : d’abord de la part du messager pour donner à Jacob son nom de désir , Israel ; Jacob demande, ensuite, le nom du messager et à la place de celui-ci il en obtient la bénédiction. Cf. in Jérusalem , Gn. 32 , 26-31.

29 Chapitre 3 , 14

30 Ézéchiel 18 , 2 ; Cf. aussi : Jérémie , 31 , 29. De ce proverbe, Catherine Mathelin a fait le titre d’un livre remarquable sur la clinique psychanalytique avec les enfants : Raisins verts et dents agacées , collection l’Espace Analytique, Denoël, Paris, 1994.

31 Dor, Joël ; Le père et sa fonction en psychanalyse, Points hors-ligne, Paris, 1989.

32 Mannoni, Maud ; L’Éducation impossible , éd. Du Seuil, Paris, 1973.

33 Kafka, Franz ; La lettre au père , in Les cahiers in octavo et Souvenirs de noce à la campagne , NRF, Gallimard, Paris.

34 Freud, Sigmund ; Le Président Schreber in Cinq psychanalyses , PUF, Paris.

35 Leclaire, Serge ; Psychanalyser , Coll. Le Champ freudien, Seuil, Paris, 1968

36 Gárate-Martínez, Ignacio ; Le verrou de la phobie ; in Clinique des phobies , Esquisses psychanalytiques , n° 21, Publication du Centre de Formation et de Recherches Psychanalytiques. Septembre 1994, pp. 11-20. Ce passage “ autour du kiki ” se trouve précisément p. 18. À propos de la fonction paternelle on pourra consulter aussi, du même auteur : Devenir père ; in Le père et le symptôme , Esquisses psychanalytiques , n° 19, Publication du Centre de Formation et de Recherches Psychanalytiques. Printemps 1993, pp. 53-58.

37 Audouard, Xavier ; Op. Cit . pp. 15-16.

38 Char, René ; Lettera amorosa , in O. C ., La Pléiade , Gallimard, Paris 1983, p. 343.

39 Bellet, Maurice ; Incipit ou le commencement , Desclée de Brouwer, Paris, 1992, pp. 75-77.

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