lundi 23 janvier 2012
APPEL pour l’AVENIR de l’ECOLE EXPERIMENTALE DE BONNEUIL
Non à la fusion–absorption, non à la dissolution
du Centre d’Etudes et de Recherches Pédagogiques et Psychanalytiques
Cet appel émane d'un groupe d'anciens de l'école expérimentale de Bonneuil. Pour chacun d'entre eux le passage par l'école expérimentale a constitué un moment essentiel de leur parcours. Cet appel vient en appui de la lettre ouverte des membres de l’équipe.
Fondé par Maud Mannoni et Robert Lefort en 1969, le Centre d’Etudes et de Recherches Pédagogiques et Psychanalytiques a constitué une expérience originale d’accueil d’enfants et d’adolescents présentés comme porteurs d’autisme, de psychoses ou de refus et retards scolaire importants. L’Ecole Expérimentale a été agréée en 1975 comme hôpital de jour avec des lieux d’accueil de nuit, ensuite un service de placement familial a été reconnu.
Maud Mannoni a rendu compte de cette expérience dans des livres traduits en plusieurs langues. La renommée de ce « lieu pour vivre » a attiré de très nombreux stagiaires étrangers. Le point crucial est la création d’alternatives à l’institution fermée et la critique des effets de ségrégation en référence à la psychanalyse : « La notion d'institution éclatée... offre... sur fond de permanence, des ouvertures sur l'extérieur... (des séjours hors de l'institution)... A travers cette oscillation d'un lieu à l'autre, peut émerger un sujet s'interrogeant sur ce qu'il veut. » (" Education impossible ”, Seuil 1973, p. 77). Ces différents lieux permettent d’accueillir les symptômes comme questions qui traversent le sujet. Il ne s’agit pas les traiter comme troubles à réduire mais de faire une place au sujet qui se cherche à travers eux.
Aujourd'hui l'école expérimentale est en cours de reprise par l'association Aurore.
La dernière assemblée générale de juillet 2011 nous a mis en alerte, car pour la première fois depuis la fondation, le rapport moral n'a pas été soumis au vote. Les questions de plusieurs membres de l'association concernant la pérennité des orientations de travail qui assurent la singularité de l'institution éclatée n'ont pas pu être entendues ni recevoir de réponse. Elles reprenaient les questions formulées par l'équipe dans un premier courrier le 8 avril 2011 qui étaient déjà restées sans réponse.
Une assemblée générale extraordinaire devait avoir lieu afin de voter la dissolution de l’association et le passage à Aurore. Elle était fixée en juin 2012. Elle a été convoquée le 3 février 2012 sans qu’aucune urgence ne le justifie. Ces procédés nous font craindre une volonté de passage en force.
L’équipe consultée à la demande du président en début janvier a voté non avec une majorité claire.
Dans ce contexte il nous paraît indispensable de porter les questions liées aux orientations devant l’ensemble des membres de l’association, devant le conseil d’administration ; particulièrement les membres psychiatres et psychanalystes.
Afin que ce questionnement ne demeure pas lettre morte une nouvelle fois, nous avons décidé d’informer très largement le réseau des anciens qui sont passés par Bonneuil ainsi que des professionnels de l’éducation, de la santé mentale, pour qui l’expérience de Bonneuil est essentielle en tant que tentative originale de soutenir un travail clinique en institution.
Nous disons : non à la dissolution et à la fusion absorption, dans les conditions actuelles.
Nous demandons un moratoire d'un an minimum , pour travailler avec l’équipe sur ce qui peut être maintenu des orientations fondatrices de l'institution éclatée et sur les transformations possibles au vu des contraintes actuelles. Ce projet précisera ce qui doit être tenu, ce qui sera transformé et négocié dans le cadre d’un éventuel regroupement.
S’il doit y avoir regroupement, il doit se faire sur la base d'une convention écrite précisant les engagements sur les dispositifs à mettre en œuvre par les partenaires éventuels en accord avec les autorités de tutelle.
Nous affirmons qu’il ne s'agit pas de survivre à tout prix : en cas de passage en force nous tenons à affirmer clairement la fin de l'institution éclatée et de l'école expérimentale : Maud Mannoni au moment de l’agrément en 1975 a refusé de céder sur les principes et a toujours soutenu qu’une fin digne était préférable aux arrangements gestionnaires.
Nous saluons le courage de l’équipe qui, dans ce contexte difficile où elle a été malmenée, a su faire preuve de constance et de créativité (camps théâtre, exposition de peinture) pour maintenir vivantes les intuitions fondatrices.
Nous appelons le conseil d’administration à prendre en considération son appel et à respecter son travail. Aux administrateurs de mettre en œuvre avec l’équipe, la démarche de réflexion et d’accompagnement nécessaire pour que les orientations fondatrices dont l’équipe a montré la fécondité toujours vivante puissent être maintenues dans l’avenir.
IL Y A URGENCE
A NE PAS CEDER A L’ILLUSION D’UNE
URGENCE !
Pour une politique différente de la santé mentale
Vous qui êtes administrateurs, élus par les adhérents du CERPP et
garants de l’institution, nous vous demandons avec insistance de réagir, et
de vous prononcer clairement pour soutenir le refus de la fusion-dissolution
avec Aurore.
Par cette lettre ouverte, nous, salariés de l’Ecole Expérimentale de
Bonneuil, opposés à une procédure de fusion-absorption avec l’association
Aurore, demandons un moratoire d’une année, au regard du résultat de la
consultation en interne (05/01/12) qui a aboutit à un NON majoritaire à cette
procédure de fusion-absorption.
L’Ecole Expérimentale de Bonneuil, fondée en 1969 par Maud
Mannoni, le Dr. Robert Lefort, psychanalystes, et les Guérin, éducateurs, se
trouve aujourd’hui confrontée à un point de butée : un projet de fusion-absorption avec l’association Aurore (association gérant 60 services et 850
salariés) imposé par le CA et la direction de l’école.
Cette fusion-absorption signifierait la dissolution de l’association
CERPP (Centre d’Etude et de Recherches Pédagogiques et Psychanalytiques),
qui garantit les principes fondateurs de l’Ecole Expérimentale de Bonneuil,
porteuse d’un combat pour une politique différente de la santé mentale.
Nous ne sommes soumis à aucune urgence économique, ni obligation
légale à être fusionné-absorbé par Aurore. C’est pourquoi nous souhaitons disposer d’une année afin d’élaborer d’autres perspectives d’avenir réalisables.
Nous pensons que la concomitance entre la proposition de fusion-absorption avec Aurore (février 2012) et le départ de notre direction (juillet
2012) est préjudiciable au choix d’une future direction qui doit assurer la
pérennité de nos orientations cliniques.
Dès sa fondation, l’Ecole s’est donnée pour mission d’accueillir des
enfants et des adolescents souffrant de troubles psychiques plus ou moins
graves. Un des axes majeurs du travail a été d’emblée la lutte contre la
ségrégation avec comme enjeu de tenter le maximum pour éviter aux
patients un destin asilaire.
A partir de la pratique immédiate avec les enfants, s’est dégagée la
notion d’institution « éclatée », c’est-à-dire ouverte sur l’extérieur, visant à
introduire du jeu dans les situations sans issue. Ainsi, un trajet singulier est
rendu possible grâce à la circulation entre plusieurs lieux hétérogènes
(accueil de jour, accueil de nuit, travail à l’extérieur dans des petites
entreprises, séjour de vacances, séjour en familles d’accueil, ateliers et
activités de l’Ecole), pour permettre au jeune d’être accueilli dans sa
singularité.
La visée principale du travail de l’Ecole est de questionner la place
possible dans le tissu social pour des jeunes en difficulté, et non pas de
« produire » des jeunes qui pourraient être « insérés », coûte que coûte,
dans des circuits de production économique.
Un autre axe majeur du travail est la référence à la psychanalyse
permettant l’accueil des symptômes et la prise en compte des manifestations
de l’inconscient. Par les multiples rencontres possibles, des remaniements
psychiques inaugurent de nouvelles manières d’être au monde, et en relation
avec les autres.
Les effets de remaniement produits par cette pratique qui se
réfèrent aux nombreux écrits de Maud Mannoni suscitent toujours un vif
intérêt. De multiples échanges avec d’autres institutions entraînent une
collaboration concrète avec des stagiaires étudiants ou diplômés aussi bien
en France qu’à l’étranger (Argentine, Mexique, Bulgarie, Grèce, Ukraine,
Espagne, Italie, Colombie, Chili, Suède, Brésil, Allemagne, Belgique, Suisse,
Liban, Israël…).
L’efficace du travail de l’ « institution éclatée » consiste à permettre à
des jeunes et à leur environnement familial d’inventer de façon singulière de
nouvelles réponses aux symptômes et c’est dans ce changement même,
dans la création d’un autre rapport que quelque chose d’une parole nouée
peut affleurer. C’est dire que le travail se situe non pas du côté d’une
production, mais bien plus du côté de la création.
Ensemble soutenons la demande d’un moratoire afin d’envisager l’avenir de l’Ecole de façon réfléchie et sereine.
Merci de nous adresser vos lettres de soutien à l’adresse mail ci-dessous :
Adresse mail de contact et de soutien :
Signature des salariés opposés à la fusion-absorption :
bonneuil suite
jf duvic
lundi 02 juillet 2012