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Traduction permanente d’un texte de Freud

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Joseph Rouzel

dimanche 05 novembre 2006

J’ouvre ici un Forum permanent de traduction d’un texte fondamental de Freud paru en préface d’un ouvrage d’un éducateur en 1925, August Aïchhorn, ouvrage devenu introuvable que j’ai republié aux Editions du Champ Social. Le texte de Freud situe remarquablement les différences, mais aussi les convergences entre les pratiques sociales et la psychanalyse. On trouvera ici le texte original de Freud, la traduction de Marc Géraud pour le Champ Social, une proposition de traduction de Jean-Marie Vauchez. Il existe également une traduction de 1973 parue chez Privat, que je vais mettre en ligne prochainement.

Je vous invite non seulement à faire d’autres propositions, pour les germanistes, sur le texte de Freud, une expression ou un mot : mais aussi que chacun y aille de ses commentaires et critiques. Et comptez sur moi pour mettre mon grain de sel. Pour ma part j ai fourni un commentaire un assez conséquent. On le trouvera sur le site de Psychasoc, en rubrique « textes » sous le titre : « Psychanalyse et éducations spécialisée ». Si nous ne voulons pas que de tels textes fondateurs demeurent lettre morte, reste, comme le disait Lacan, à « manger le livre », donc à travailler le texte au pied de la lettre, en permanence. Sans cesse sur le métier remettons notre ouvrage…Vous pouvez répondre sur le Forum pour des textes courts ou d’humeur ou m’envoyer vos textes plus longs à paraître en rubrique « textes ».

Joseph Rouzel

GELEITWORT ZUR ERSTEN AUFLAGE (1925)

VON SIGMUND FREUD

Von allen Anwendungen der Psychoanalyse hat keine soviel Interesse gefun­den, soviel Hoffnungen erweckt und demzufolge soviele tüchtige Mitarbeiter herangezogen wie die auf die Theorie und Praxis der Kindererziehung. Dies ist leicht zu verstellen. Das Kind ist das hauptsächliche Objekt der psychoanalytischen Forschung geworden: es hat in dieser Bedeutung den Neurotiker abgelöst, an dem sie ihre Arbeit begann. Die Analyse hat im Kranken das wenig verändert fort­lebende Kind aufgezeigt wie im Träumer und im Künstler, sie hat die Triebkräfte und Tendenzen beleuchtet, die dem kindlichen Wesen sein ihm eigenes Geprägt geben und die Entwicklungswege verfolgt, die von diesem zur Reife des Erwachsenen führen. Kein Wunder also, wenn die Erwartung entstand, die psychoanalytische Bemühung um das Kind werde der erzieherischen Tätigkeit zugute kommen, die das Kind auf seinem Weg zur Reife leiten, fördern und gegen Irrungen sichern will.

Mein persönlicher Anteil an dieser Anwendung der Psychoanalyse ist sehr geringfügig gewesen. Ich hatte mir frühzeitig das Scherzwort von den drei unmög­lichen Berufen — als da sind: Erziehen, Kurieren, Regieren — zu eigen gemacht, war auch von der mittleren diese Aufgaben hinreichend in Anspruch genommen. Darum verkenne ich aber nicht den hohen sozialen Wert, den die Arbeit meiner pädagogischen Freunde beanspruchen darf.

Das vorliegende Buch des Vorstandes A. Aichhorn beschäftigt sich mit einem Teilstück des grossen Problems, mit der erzieherischen Beeinflussung der jugendlichen Verwahrlosten. Der Verfasser hatte in amtlicher Stellung als Leiter städtischer Fürsorgeanstalten lange Jahre gewirkt, ehe er mit der Psychoanalyse bekannt wurde. Sein Verhalten gegen die Pflegebefohlenen entsprang aus der Quelle einer warmen Anteilnahme an dem Schicksal dieser Unglücklichen und wurde durch eine intuitive Einfühlung in deren seelische Bedürfnisse richtig geleitet. Die Psychoanalyse konnte ihn praktisch wenig Neues lehren, aber sie brachte ihm die klare theoretische Einsicht in die Berechtigung seines Handelns und setzte ihn in den Stand, es vor anderen zu begründen.

Man kann diese Gabe des intuitiven Verständnisses nicht bei jedem Erzieher voraussetzen. Zwei Mahnungen scheinen mir aus den Erfahrungen und Erfolgen des Vorstandes Aichhorn zu resultieren. Die eine, dass der Erzieher psychoanalytisch geschult sein soll, weil ihm sonst das Objekt seiner Bemühung, das Kind, ein unzugängliches Rätsel bleibt. Eine solche Schulung wird am besten erreicht, wenn sich der Erzieher selbst einer Analyse unterwirft, sie am eigenen Leibe erlebt. Theoretischer Unterricht in der Analyse dringt nicht tief genug und schafft keine Überzeugung.

Die zweite Mahnung klingt eher konservativ, sie besagt, dass die Erziehungsarbeit etwas sui generis ist, das nicht mit psychoanalytischer Beeinflussung ver­wechselt und nicht durch sie ersetzt werden kann. Die Psychoanalyse des Kindes kann von der Erziehung als Hilfsmittel herangezogen werden. Aber sie ist nicht dazu geeignet, an ihre Stelle zu treten. Nicht nur praktische Grunde verbieten es, sondern auch theoretische Überlegungen widerraten es. Das Verhältnis zwischen Erziehung und psychoanalytischer Bemühung wird voraussichtlich in nicht ferner Zeit einer gründlichen Untersuchung unterzogen werden. Ich will hier nur Weniges andeuten. Man darf sich nicht durch die übrigens vollberechtigte Aussage irreleiten lassen, die Psychoanalyse des erwachsenen Neurotikers sei einer Nacherziehung desselben gleichzustellen. Ein Kind, auch ein entgleistes und verwahrlostes Kind, ist eben noch kein Neurotiker und Nacherziehung etwas ganz anderes als Erziehung des Unfertigen. Die Möglichkeit der analytischen Beeinflussung ruht auf ganz bestimmten Voraussetzungen, die man als „analytische Situation“ zusammenfassen kann, erfordert die Ausbildung gewisser psychischer Strukturen, eine besondere Einstellung zum Analytiker. Wo diese fehlen, wie beim Kind, beim Jugendlichen Verwahrlosten, in der Regel auch beim triebhaften Verbrecher, muss man etwas anderes machen als Analyse, was dann in der Absicht wieder mit ihr zusammentrifft. Die theoretischen Kapitel des vorliegenden Buches werden dem Leser eine erste Orientierung in der Mannigfaltigkeit dieser Entscheidungen bringen.

Ich schliesse noch eine Folgerung an, die nicht mehr für die Erziehungslehre, wohl aber für die Stellung des Erziehers bedeutsam ist. Wenn der Erzieher die Analyse durch Erfahrung an der eigenen Person erlernt hat und in die Lage kommen kann, sie bei Grenz- und Mischfällen zur Unterstützung seiner Arbeit zu ver­wenden, so muss man ihm offenbar die Ausübung der Analyse freigeben und darf ihn nicht aus engherzigen Motiven daran bindern wollen.

Préambule à la première édition (1925)

par Sigmund Freud

De toutes les applications de la psychanalyse, aucune n'a suscité autant d'intérêt, éveillé autant d'espoir et, par conséquent, attiré autant de collaborateurs compétents, que son application à la théorie et à la pratique de l'éducation des enfants. Il est facile de comprendre ce phé­nomène. L'enfant est devenu l'objet principal de la recherche psychana­lytique ; il a, dans ce rôle, pris le relais du névrosé, qui avait constitué le point de départ de son travail. L'analyse a mis au jour, chez le malade comme chez le rêveur et l'artiste, l'enfant qui continue à mener sa vie sans avoir guère changé, elle a mis en lumière les forces pulsionnelles et les tendances qui impriment à l'être enfantin le sceau qui lui est propre, elle a suivi enfin les voies évolutives qui le mènent jusqu'à la maturité de l'adulte. Il n'est donc pas étonnant que soit né l'espoir de voir l'effort psychanalytique déployé autour de l'enfant servir l'activité éducative, dont le but est de guider l'enfant sur la voie qui le mené h la maturité, de le stimuler et de le garantir de tous errements.

Personnellement, je n'ai pris qu'une part bien modeste à cette applica­tion de la psychanalyse. J'avais fait mien très tôt le bon mot qui veut qu'il y ait trois métiers impossibles — éduquer, soigner, gouverner —, et j'étais suffisamment sollicité par la deuxième de ces tâches. Ce n'est pas pour autant que je méconnais la valeur sociale élevée que le travail de mes amis éducateurs est en droit de revendiquer.

Le présent livre du Président A. Aichhorn se penche sur un fragment du grand problème, sur l'influence de l'éducation (spécialisée) sur les jeunes carences. L’auteur a œuvré pendant de longues années à son poste de directeur des établissements municipaux d'éducation protégée avant de faire la connaissance de la psychanalyse, bon comportement envers les jeunes pris en charge trouvait sa source dans i intérêt chaleureux qu'il portait au destin de ces malheureux, et une intuition empathique de leurs besoins psychiques le guidait sur la juste voie. D'un point de vue pratique, la psychanalyse ne pouvait guère lui enseigner grand-chose de nouveau, mais elle lui donna un aperçu théo­rique clair du bien-fondé de son action, et lui permit de la présenter à autrui comme une activité fondée sur des principes.

On ne peut exiger de tout éducateur ce don de compréhension intui­tive. Deux leçons me semblent résulter des expériences et des succès du Président Aichhorn. La première, c'est que l'éducateur doit avoir une formation psychanalytique, car dans le cas contraire, l'objet de ses efforts, l'enfant, restera une énigme inaccessible. Cette formation s'ac­quiert au mieux lorsque l'éducateur lui-même se soumet à une analyse, lorsqu'il la vit « à même son corps ». L'enseignement théorique de l'ana­lyse, en effet, ne conduit pas à une profondeur suffisante et ne suscite aucune conviction.

La deuxième leçon semble plutôt conservatrice, elle affirme que le travail éducatif est une discipline sui generis, qui ne doit pas être confondue avec l'approche psychanalytique, ni remplacée par elle. La psychanalyse de l'enfant peut être sollicitée par l'éducation comme un moyen auxiliaire. Mais elle n'est pas destinée à prendre sa place. Non seulement des raisons pratiques l'interdisent, mais encore des réflexions théoriques le déconseillent. Le rapport qu'entretiennent éducation et tra­vail psychanalytique sera probablement soumis à un examen appro­fondi dans un avenir proche. Je me bornerai ici à quelques indications sommaires. Il ne faut pas se laisser induire en erreur par le principe, par ailleurs pleinement justifié, selon lequel la psychanalyse du névrosé adulte peut être assimilée à une rééducation. Un enfant, quand bien même serait-il un enfant dévoyé et carence, n'est précisément pas encore névrosé, et la rééducation est quelque chose de radicalement différent de l'éducation d'un être encore inachevé. La possibilité de traitement analy­tique repose sur des conditions parfaitement déterminées, que l'on peut regrouper sous le chef de la « situation analytique », elle exige l'accès à un plein développement de certaines structures psychiques, ainsi qu'une atti­tude particulière à l'égard de l'analyste. Lorsque ces éléments font défaut, comme c'est le cas chez l'enfant, chez le jeune carence et, en règle générale aussi, chez le criminel impulsif, il convient de mettre en œuvre une pra­tique autre que l'analyse, pratique qui convergera toutefois avec elle dans son intention. Les chapitres théoriques du présent ouvrage apporteront au lecteur une première orientation dans la multiplicité de ces possibilités.

j'ajoute encore une conclusion dont l'importance ne concerne plus la théorie de l'éducation, mais le statut de l'éducateur. Si l'éducateur a appris la psychanalyse en l'expérimentant sur sa propre personne et s'il se trouve en situation de l'employer dans des cas limites et mixtes pour étayer son travail, il faut de toute évidence lui autoriser l'exercice libre de l'analyse, et non vouloir l'en empêcher pour des motifs qui ne relève­raient que de l'étroitesse d'esprit.

(Traduction de Marc Géraud, parue dans August Aïchhorn, Jeunes en souffrance , Editions du Champ Social)

Préambule à la première édition (1925)

par Sigmund Freud

De toutes les applications de la psychanalyse, aucune n'a suscité autant d'intérêt, éveillé autant d'espoir et, par conséquent, attiré autant de collaborateurs compétents, que son application à la théorie et à la pratique de l'éducation des enfants. Ceci est facile à comprendre. L'enfant est devenu l'objet principal de la recherche psychana­lytique ; il a, dans ce rôle, pris la place du névrosé, qui lui avait commencé le travail. L'analyse a mis au jour, chez le malade comme chez le rêveur et l'artiste, l'enfant qui continue à mener sa vie sans avoir guère changé, elle a mis en lumière les forces pulsionnelles et les tendances qui impriment à l'être enfantin le sceau qui lui est propre, elle a suivi enfin les voies évolutives qui le mènent jusqu'à la maturité de l'adulte. Il n'est donc pas étonnant que soit né l'espoir de voir l'effort psychanalytique déployé autour de l'enfant servir l'activité éducative, dont le but est de guider l'enfant sur la voie qui le mène à la maturité, de le stimuler et de le garantir de tous errements.

Personnellement, je n'ai pris qu'une part bien modeste à cette applica­tion de la psychanalyse. J'avais fait mien très tôt le bon mot des trois métiers impossibles — à savoir: éduquer, soigner, gouverner —, et j'étais suffisamment sollicité par la deuxième de ces tâches. C'est pourquoi je ne méconnais pas la valeur sociale élevée que le travail de mes amis éducateurs est en droit de revendiquer.

Le présent livre du Président A. Aichhorn se penche sur un fragment du grand problème, sur l'influence de la pédagogie sur la jeunesse délaissée. L’auteur a œuvré pendant de longues années à son poste de directeur des établissements municipaux d'éducation protégée avant de faire la connaissance de la psychanalyse. Son comportement envers ces patients trouvait sa source dans l'intérêt chaleureux qu'il portait au destin de ces malchanceux, et une attention intuitive de leurs besoins psychiques le guidait sur la juste voie. La psychanalyse ne pouvait, en pratique lui enseigner que peu de nouveau, mais elle lui donna une aperçu théo­rique clair du bien-fondé de son action, et lui permit de la présenter à autrui comme une activité fondée sur des principes.

On ne peut exiger de tout éducateur ce don de compréhension intui­tive. Deux leçons me semblent résulter des expériences et des succès du Président Aichhorn. La première, c'est que l'éducateur doit avoir une formation psychanalytique, car dans le cas contraire, l'objet de ses efforts, l'enfant, restera une énigme inaccessible. Une telle formation sera atteinte au mieux lorsque l'éducateur se soumet lui-même à une analyse, lorsqu'il l'éprouve dans son corps. L'enseignement théorique de l'ana­lyse, en effet, ne conduit pas à une profondeur suffisante et ne suscite aucune conviction.

La deuxième leçon semble plutôt conservatrice, elle affirme que le travail éducatif est en quelque sorte sui generis, et ne doit pas être confondue avec l'approche psychanalytique, ni remplacée par elle. La psychanalyse de l'enfant peut devenir un moyen pour l'éducation. Mais elle n'est pas destinée à prendre sa place. Non seulement des raisons pratiques l'interdisent, mais encore des réflexions théoriques le déconseillent. La relation entre éducation et tra­vail psychanalytique sera probablement soumis à un examen appro­fondi dans un avenir proche. Je ne proposerai ici que quelques petites suggestions. Il ne faut pas se laisser tromper par le principe, par ailleurs pleinement justifié, selon lequel la psychanalyse du névrosé adulte peut être assimilée à une rééducation. Un enfant, quand bien même serait-il un enfant en dehors du bon chemin et abandonné, n'est pas encore un névrosé, et la rééducation est quelque chose de radicalement différent de l'éducation d'un être encore inachevé. La possibilité de traitement analy­tique repose sur des conditions parfaitement déterminées, que l'on peut regrouper sous le chef de la «situation analytique », exige la formation de certaines structures psychiques, ainsi qu'une attitude particulière à l'égard de l'analyste. Lorsque cela manque, comme c'est le cas chez l'enfant, chez le jeune dévoyé et, en règle générale aussi, chez le criminel impulsif, il faut faire autre chose que l'analyse, quelque chose qui la rejoindra dans son intention. Les chapitres théoriques du présent ouvrage apporteront au lecteur une première orientation dans la multiplicité de ces possibilités.

j'ajoute encore une conclusion dont l'importance ne concerne plus la théorie de l'éducation, mais le statut de l'éducateur. Si l'éducateur a appris la psychanalyse en l'expérimentant sur sa propre personne et s'il se trouve en situation de l'employer dans des cas limites et mixtes pour étayer son travail, il faut de toute évidence lui donner librement l'exercice de l'analyse, et non vouloir l'en empêcher pour des motifs mesquins

(Traduction Jean-Marie Vauchez)

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